A Giverny, l'équipe de la Maison de Monet sous la direction de Madame Linsey, attache beaucoup d'importance à considérer qu'il s'agit d'un lieu de mémoire, et ce, à plusieurs titres.
D'abord, le jardin. Au pied du perron, face à une maison rose tournant le dos à la rue, il valorise la richesse des propriétaires. Il symbolise le jardin bourgeois de la fin du XIXe, début XXe siècle. Les vases bleus, source d'inspiration de tableaux, affirment le regard vers l'Orient. Les roses, les massifs raffinés de fleurs "que l'on rentre l'hiver" (géraniums, bégonias) entouraient les fauteuils de jardin en osier peints en vert.
L'accueil est maîtrise de l'apparence sociale. Peine, drame, tourment, toute forme d'intériorité se taît devant l'exigence de l'éducation. Et le capital des plantes vivaces, fierté des lieux, donne chaque année sa rente de fleurs.
Ce jardin monte. Au printemps, les crocus sont proches du sol. En mai, les iris s'élèvent un peu plus haut. Les roses et les clématites, en juin, jouent avec le vent dans les pavots. Et à l'automne, les somptueux et immenses dahlias se croisent avec les masses veloutées des asters.
Face au perron, l'allée aux capucines, lieu de mémoire par excellence. Les voix disparues des hôtes de Monet ont le timbre de Zola, Cézanne, Clemenceau, Proust, Pissarro, Berthe Morisot, Octave Mirbeau... Tous ceux qui marquèrent les échanges culturels de cette époque vinrent ici. Et l'ombre de Mallarmé dont la photo nous accueille au petit salon cristallise les débats qui s'y déroulèrent.
Lieu de mémoire car l'ordonnance des allées est signe du mode de vie en autarcie des habitants. Le poulailler, celui des poules brunes, dit l'importance des volailles et des oeufs au menu quotidien tandis que le verger, avec ses cordons de pommiers et ses chandeliers de poiriers, est souvenir du rite de garder tout l'hiver, au fruitier, les desserts de la terre. Au fond, la place ronde sous l'arbre se souvient des ouvrages des dames, occupation des lourdes canicules.
Lieu de mémoire habité par le génie de Monet, ce grand bourgeois qui vit ici sa période glorieuse. Voici une allée qui montre les dégradés des bleus ou les couleurs complémentaires. On se souvient de sa recherche de la transparence, de cette quête pour saisir un bleu sur des supports différents, à l'ombre, en plein soleil, ou dans le repli d'un pétale d'iris. Non le dessin mais la couleur. Regarder ces bordures mauves le long des allées de gravillon jaune, presque pointillistes, avec ces festons ombrés. Ou saisir en mai-juin la profusion des bleus dans le jardin lorsque les dégradés varient sous l'effet du mouvement des tiges. Lieu de mémoire car chaque catégorie de plantes rappelle telle lettre de Monet se souciant des graines de pavots ou telle autre parlant de la rapidité de la floraison des iris.
Lieu de mémoire, lieu de création deux fois né de l'esprit, tel nous apparaît le jardin d'eau. Ici Monet crée un univers inversé, où le jeu des ombres est calculé : au centre, les variations infinies du ciel, en bordure l'épaisseur des reflets de la végétation et sur les feuilles rondes posées sur l'eau, l'ombre se couche, ne peut pénétrer la nappe. A l'extrémité, près du petit barrage, l'apparition de "petites vagues à la Monet" comme l'écrit Zola, vagues qui estompent la limite des formes. Des branches de saules effleurent la nappe d'eau, jouent de la réverbération. A cet univers tout en nuances instables, Monet superpose une seconde création, celle de ses séries de Nymphéas.
Lieu de mémoire aussi, la maison. Mais plus que la cuisine, territoire des femmes ou la salle à manger, convivialité intellectuelle, ce sont les murs qui fascinent, eux qui exposent la collection d'estampes japonaises. Les cadrages des oeuvres du Maître à propos des motifs pris dans le jardin, petit à petit, subiront cette influence-là.
Marie-Rose Faure,
Responsable du Service éducatif des trois musées.
N.B. Les groupes d'élèves, lors de leur inscription, peuvent recevoir le dossier pédagogique préparant leur visite. Des formations d'enseignants s'y déroulent régulièrement. On peut compléter avec profit la visite en s'imprégnant au Musée d'Art Américain de l'influence de Monet sur ses élèves d'Outre-Atlantique. Au musée de Vernon, il faut absolument contempler les deux tableaux du peintre, dont un "Nymphéas".
Voir aussi :
Liste des plantes et des fleurs du jardin
de
Claude Monet
Calendrier de floraison du jardin de Claude
Monet
Le jardin de Claude Monet
en
automne
Philippe Delerm at Giverny
Plan du jardin de Claude Monet à Giverny
(91Ko)
Vue aérienne des jardins de Claude Monet (78
Ko)
Trucs et astuces : les bons
plans
Conférence
: Un lieu pour l'oeil, Monet dans son jardin à Giverny
Bibliographie
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Modifié le : Saturday, 07-Apr-2018 05:01:36 EDT